Conversations 2015 – Récit d’une belle aventure

Une des réussites dont nous sommes le plus fiers est notre participation au colloque Conversations 2015. Femmes et sport qui s’est tenu à Québec en juin 2015.

Tout a commencé à l’hiver 2015 quand Guylaine Demers, l’organisatrice du colloque, a communiqué avec nous en nous disant qu’elle pensait que l’on pourrait l’aider. Yahya et Marie-Jules sont allés la rencontrer et sont revenus au bureau en disant qu’ils avaient rencontré la « cliente parfaite »! Une leader qui allait s’avérer notre meilleure cliente à vie: audacieuse, énergique et qui souhaitait changer les choses pour vrai! En plus, ce qu’elle avait promis en annonçant son colloque préparait de belle manière la voie pour une heureuse collaboration :

Conversations 2015 se veut une occasion de collaborer pour trouver des solutions concrètes aux problèmes récurrents rencontrés par les femmes et les filles dans les systèmes sportifs québécois et canadien.

Avec une telle promesse venait le souhait de proposer un événement différent, qui permettrait aux participantes (une grande majorité de femmes) de faire de belles rencontres, d’apprendre et de contribuer à l’évolution du système sportif. Il y avait donc un « fit » naturel entre elle et nous.

Avant d’aller plus loin, vendons le punch avec cet extrait de la plénière du vendredi matin, alors que Marion Lay, résumait l’événement qui était en train de s’achever (elle a été athlète olympique, a siégé au comité organisateur des Jeux de Vancouver 2010 et est présidente de Think Sport) :

I’ve been in a million conferences, I would have resisted because I often think that the facilitation doesn’t work. But this was brilliant, and it has brought us to a place that I am so motivated and excited about : together, the one team, going forward, including others, bringing out larger network and working together for change. (Traduction libre : J’ai participé à un million de conférences! J’aurais habituellement résisté à un tel processus parce que souvent, la facilitation ne fonctionne pas. Mais cette fois-ci, c’était brillant! L’exercice nous a menées à un endroit qui me motive et m’excite : ensemble, une grande équipe prête à aller de l’avant avec ouverture et inclusion pour mobiliser un réseau plus grand et travailler ensemble à changer les choses.)

Ceci étant dit, revenons à notre histoire.

C’est donc avec un bel enthousiasme que nous nous sommes mis au travail. Le comité organisateur de l’événement avait déjà créé une programmation préliminaire avec des thèmes, des conférences, des ateliers et un déroulé déjà assez bien ficelé. Aussi, des facilitatrices professionnelles étaient mobilisées pour animer les ateliers. La première étape était donc de plonger dans ce qui existait pour en extraire les objectifs et les intentions et voir comment on pouvait venir y inscrire une trame de résolution de problèmes à la sauce « En mode solutions ». Nous étions alors en mars et l’événement allait avoir lieu au début de juin. Entre 150 et 300 personnes étaient attendues. Des participantes de partout au Canada et d’ailleurs dans le Monde. L’événement allait être bilingue et se dérouler sur une période de quatre jours, du mercredi en soirée jusqu’au vendredi midi. Il était donc minuit moins une pour modifier la programmation, adapter les outils, prévoir l’animation et former les facilitatrices.

Comme toujours, notre premier réflexe a été de voir si la programmation existante ne pouvait pas être aménagée de manière à atteindre les objectifs (on ne passe pas le bulldozer tout de suite!). Assez rapidement, il nous est apparu qu’il pourrait être beaucoup plus efficace de pouvoir travailler avec l’ensemble des participantes pendant au moins une journée et de faciliter cette journée de manière « centrale » plutôt que de travailler en ateliers dans des salles indépendantes les unes des autres.

L’espace le permettait, plusieurs locaux avaient été réservés sur le campus de l’Université Laval, dont une des patinoires du PEPS (sans glace bien sûr!).

Fidèles à nos habitudes, nous avons résumé les paramètres de l’événement sur un de nos grands tableaux blancs. Nous y avons esquissé une ligne du temps des grands moments de l’événement et noté les questions pour lesquelles nous avions besoin d’obtenir des réponses (photo du tableau reproduite ci-bas). Nous avons ensuite invité Guylaine à venir passer quelques heures avec nous au bureau afin d’explorer quelques scénarios et trouver des réponses à nos questions.

tableau-femmesetsport

Guylaine a rapidement validé nos premières intuitions, répondu à nos questions et accepté d’explorer un scénario qui viendrait remanier de manière assez significative le programme préliminaire qui avait déjà été diffusé.

Nous avons ainsi retravaillé le programme pour en faire un processus qui permettrait d’offrir plusieurs des éléments d’une conférence scientifique traditionnelle tout en offrant une expérience collaborative de haut niveau. Voici donc les grandes étapes de ce programme.

Mardi 9 juin

Inscriptions des 200 participantes en après-midi et ouverture par un cocktail, quelques bouchées et des conférences de Chantal Petitclerc et Hayley Wickenheiser. Animation par l’olympienne Catriona Le May Doan.

Mercredi  10 juin

En avant-midi, présentations de l’état des lieux autour des cinq thèmes: participation des filles, femmes d’influence, sport féminin et médias, homophobie en sport et les entraîneures. Ces présentations étaient faites de manière plus traditionnelle (ce qui n’est pas mauvais… c’est bon de partager les connaissances et de prendre le temps d’écouter des experts). Chacune des participantes pouvait assister aux présentations de deux thématiques.

Lunch et temps libre avec des activités sportives offertes aux participantes (yoga, volleyball de plage, jogging)

En après-midi, on commence à sortir du moule des événements plus traditionnels. Travail en ateliers pour chacune des cinq thématiques afin d’explorer les enjeux à plus haut niveau et identifier les problèmes sur lesquels les participantes travailleront le lendemain. À l’issue de cette étape, quatre problèmes avaient été identifiés pour chacun des thèmes et nous avons pu annoncer en début de soirée les 20 problèmes pour lesquels tous les participants chercheraient des solutions le lendemain.

Ces ateliers étaient animés par des facilitatrices expérimentées qui travaillaient en duos bilingues. Nous avions créé un processus assez simple afin de nous assurer que même si chacun des ateliers n’était pas animé exactement de la même manière, les résultats seraient les mêmes : les quatre problèmes ayant créé le plus grand consensus seraient retenus pour le lendemain.

Nous avions été en contact avec les facilitatrices par Skype (elles provenaient de tout le Canada) et un document avait été préparé pour elles afin de leur présenter le processus en détail et leur permettre de se préparer. Une présentation PowerPoint bilingue ainsi que les fiches de travail pour l’identification des problèmes avaient aussi été préparées pour les facilitatrices. Une rencontre a eu lieu « en personne » le mardi après-midi afin de reviser les étapes et rassurer toute l’équipe. On leur a fait ça « clé en main »! Nous avons vraiment cherché à rassurer les facilitatrices et à leur permettre soit de suivre le processus à la lettre ou encore à le modifier légèrement afin de l’adapter à leur style.

Tout au long de l’après-midi, nous avons visité chacun des groupes et tout s’est tellement bien passé que nous n’avons rien eu à faire! À l’issue de l’après-midi, les problèmes étaient identifiés et les organisatrices, les facilitatrices et les participantes étaient ravies.

Mais le travail n’était pas terminé pour nous, bien au contraire… Il nous fallait maintenant monter nos panneaux dans l’amphithéâtre du PEPS et préparer la salle pour y accueillir les 200 participantes le lendemain matin.

Jeudi 11 juin

À partir de ce moment, on faisait vivre une expérience nouvelle aux gens avec un processus En mode solutions. Ce processus, on l’a inventé à partir de plusieurs inspirations et nous le raffinons et l’adaptons constamment. Mais disons que c’est rendu assez au point et que ça génère des résultats surprenants! On en est pas mal fiers.

Les participantes étaient accueillies par 20 panneaux sur lesquels étaient affichés le nom des problèmes et les espaces pour y consigner le résultat du travail de chacune des étapes.

La facilitation se faisait de manière centrale (JS en anglais et MJ en français). Toutes les participantes pouvaient contribuer dans la langue de leur choix et étaient invitées à s’entraider pour que les personnes unilingues puissent participer à chacun des problèmes. Tout s’est bien déroulé de ce côté, la majorité des échanges se déroulant en anglais tout en permettant à quelques groupes de travailler en français. Des personnes unilingues ont pu participer dans ces groupes avec l’aide de participantes bilingues.

Vous pourrez voir dans la vidéo qui suit les gens en train de travailler sur les grands tableaux. Les étapes pour cet événement étaient de schématiser le problème, identifier les noeuds, proposer des solutions (dans ce cas, on voulait des bonnes pratiques, des questions de recherche et des idées nouvelles) puis, enfin, un plan pour passer à l’action.

Comme toujours avec les processus En mode solutions, les participantes ont été surprises par le travail accompli en seulement une journée. La vidéo suivante présente l’ensemble de l’événement. Vous y verrez donc toutes les étapes ainsi que des témoignages partagés lors de la plénière du vendredi matin (dont celui cité en ouverture de ce texte).

L’événement a donc été un superbe succès et les objectifs atteints. Mais ce n’est qu’une étape dans une démarche plus grande. Le contenu des tableaux a été consigné pendant l’été et partagé aux participantes. Des comités de travail ont été formés et leur action est nourrie par le contenu créé lors de l’événement. Les partenaires de l’événement (dont Égale action et CAAWS) s’assurent de la coordination des actions sur le terrain et aussi, de garder vivante la flamme qui a été allumée pendant Conversations 2015.

Si ce fut un succès pour le comité organisateur et pour les participantes, cet événement comportait pour nous de réels défis de facilitation qui, avouons-le, nous ont donné quelques vertiges dans les jours précédant le colloque. En voici quelques-uns en vrac:

  • Oser espérer générer des inscriptions sans un réel programme mais plutôt offrir cinq thématiques de travail et l’intention de “rechercher des solutions” pour des problèmes encore non identifiés. Que deux cents personnes aient accepté de jouer le jeu est assurément un signe qu’il y a des gens qui sont prêts à sortir du cadre conventionnel des congrès et colloques qui ne sont trop souvent qu’une succession de présentations et de panels d’experts.
  • Notre deuxième défi principal était contenu dans le premier: ne pas avoir identifié les problèmes à l’avance. Normalement, les journées En mode solutions que nous organisons font l’objet d’un appel à problèmes bien avant l’événement. Ainsi, nous pouvons travailler à identifier des problèmes concrets, les formuler de façon efficace avec celui qui en sera le porteur et donc, d’avoir une bonne idée de la matière première avec laquelle nous allons travailler. Là, rien. Seulement la relative assurance que les experts dans les ateliers thématiques du matin allaient soulever suffisamment d’enjeux et de pistes pour stimuler l’étape d’identification des problèmes. Et aussi, la confiance que le processus bâti pour l’après-midi jumelé à l’expérience des facilitatrices allait permettre l’émergence de problèmes concrets et mobilisateurs pour la journée du lendemain.
  • Devoir animer en anglais et en français, tout en évitant l’ennui causé par la répétition nous a obligés à aller encore plus loin dans notre complicité de facilitateurs. Depuis un temps déjà, nous animons tous nos événements à deux. Nous trouvons une grande satisfaction personnelle et nous y gagnons beaucoup en efficacité, en complémentarité et aussi, en plaisir! Cette habitude déjà ancrée nous a permis de pouvoir offrir une facilitation bilingue fluide et efficace.
  • Finalement, il est très rare que nous devions travailler avec d’autres facilitateurs. Dans ce cas-ci, nous avions à travailler avec une quinzaine de facilitatrices, couvrant tous les fuseaux horaires du Canada, et nous assurer que nous leur proposions un programme “fail safe”, efficace, tout en restant intéressant à faciliter pour des professionnelles expérimentées. Nous avons donc animé deux ateliers de formation à distance, créé des guides d’animations bilingues, des feuilles de travail, des diapositives de soutien à leur travail en atelier, le tout en français et en anglais. Et après tout ça, il fallait lâcher prise! Cette équipe de facilitatrices s’est révélée hors-pair, hautement professionnelle et très généreuse. Grâce à elles, nous avons pu travailler sur des problèmes de haut niveau qui ont su stimuler les échanges et la créativité des participantes.

Depuis cet événement, nous sommes plus que jamais convaincus qu’il est possible de proposer des colloques, forums et congrès qui permettent de générer des résultats hors du commun. Ces événements doivent sortir du cadre générique du “réseautage” pour se propulser vers une mobilisation efficace des savoirs et de la résolution innovante de problèmes réels. De tels événements rassemblent en un seul lieu trop de personnes compétentes et motivées pour laisser à moitié exploité, un pareil terreau de connaissances.

De notre côté, nous pensons déjà au prochain défi qui sera lancé aux participantes du colloque Conversations 2018. Femmes et sports. Une chose est certaine, on n’y discutera pas des mêmes problèmes qu’en 2015, car les choses auront évolué.

Voilà pour notre premier récit d’une belle aventure vécue sur le terrain. Vos commentaires sont évidemment les bienvenus!

JS et MJ

2 réactions sur “ Conversations 2015 – Récit d’une belle aventure ”

  1. Guylaine Demers

    Vous avez laissé un TRÈS GROS SIGNE DE PISTE dans ma vie…

  2. Ping Conversations 2015 – L’autre coté de l’expérience: celle du client | Signes de piste

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